Dégoûtés, des anciens du comté de Tyrone quittent les provisoires

Source : The Sunday Tribune du 24 octobre 2010.

Une des figures les plus éminentes de l’ex-IRA provisoire du Nord a affirmé que la communauté nationaliste ne devait pas livrer de renseignements à la police PSNI ni collaborer en quelque façon avec elle.

Lors d’une interview exclusive au journal Sunday Tribune, Brian Arthurs, ancien commandant de la Brigade du Tyrone, a expliqué que Sinn Féin et « d’autres partis nationalistes constitutionnels » avaient tort de dire qu’il fallait soutenir le PSNI.

Arthurs, qui était autrefois étroitement associé à Gerry Adams et Martin McGuinness, a dit qu’il avait soutenu l’accord du vendredi saint, mais qu’il avait entre temps perdu ses illusions suite à la faillite de cette voie vers l’unité irlandaise

Des commentaires semblables ont été faits par Peter McCaughey, ancien haut responsable de l’IRA provisoire du comté de Tyrone. Les deux hommes ont révélé qu’ils avaient quitté Sinn Féin il y a deux ans, après une scission majeure dans le mouvement républicain du Tyrone.

Cinq cummain [comités] Sinn Féin et 90% de l’ancienne brigade du Tyrone de l’est ont quitté l’organisation. Arthurs a précisé que « personne ne niait qu’il y avait eu des changements dans le Nord, mais c’est une politique vers l’égalité dans le Nord qui est recherchée. Les gens ne sont pas morts et n’ont pas pris les armes pour cette égalité. Ils l’ont fait pour la liberté de l’Irlande ».

Il ajoute qu’ « un immeuble de 100 millions de £ a été construit dans le Nord et 5.000 soldats britanniques restent en place. Une unité de renseignement britannique vient d’être déployée à Derry. David Cameron a dit au congrès du parti Tory qu’il était le premier ministre de la Grande-Bretagne et de l’Irlande du Nord. Il a souligné l’importance de l’union et a dit ‘c’est ensemble que nous devons rester’. Aucun républicain ne peut voir l’unité irlandaise dans tous ces phénomènes. Il faudrait se souvenir que nous avons, en tant que républicains, pris l’engagement de combattre jusqu’à ce que la Grande-Bretagne déclare son intention de se retirer d’Irlande. »

Arthurs er McCaughey viennent tous les deux de familles républicaines éminentes. Declan Arthurs, frère de Brian, faisait partie des huit militants de l’IRA tués par le SAS à Loughall en 1987. Martin McCaughey, frère de Peter, a été tué en service actif en compagnie de Dessie Grew par le SAS en 1990.

Un certain nombre de sociétés républicaines indépendantes, nommées d’après des leaders de 1916 et d’autres martyrs républicains, se sont formées dans le Tyrone. « Nous avons six sociétés avec en tout 200 membres et nous sommes en train d’en former six autres » dit Arthurs.

Il explique que ces sociétés « se sont engagées à arborer les idéaux de la Proclamation de 1916 et de l’auto-détermination nationale irlandaise » et qu’elles étaient composées de membres jeunes ainsi que d’activistes républicains vétérans.
Ces sociétés ont tenu un rassemblement de 1.500 personnes au début de ce mois d’octobre, pour commémorer le 20è anniversaire du martyr de Martin McCaughey et Dessie Grew. Peter McCaughey a dit qu’il était extrêmement troublé par les condamnations portées par Sinn Féin contre ceux qui restent engagés sur la voie de la « lutte armée ».

Après l’attaque à la bombe de la Real IRA contre la Ulster Bank à Derry, Martin McGuiness a qualifié les responsables de « junkies du conflit » et de « néanderthaliens ». Après le meurtre de deux soldats britanniques à Massereene l’année dernière, il a traité les responsables de « traîtres à l’île d’Irlande ». Peter Mccaughey a dit : « Mon frère était-il un « junkie du conflit », un « néanderthalien » ou un « traître à l’île d’Irlande »? C’est ainsi que Martin McGuinness le qualifierait s’il était tué aujourd’hui en service actif. Mon frère était un combattant de la liberté. Il a combattu pour une Irlande unie. Cet objectif existe encore et il reste profondément cher au coeur des républicains du Tyrone. Nous avons été dégoûtés quand Martin McGuinness a parlé devant les portes de Stormont aux côtés du chef du PSNI après Massereene et qu’il a diabolisé les républicains. Il ne parlait pas en notre nom. »

Brian Arthurs a dit que « la communauté nationaliste ne devait pas livrer de renseignements à la police PSNI ni collaborer en quelque façon avec elle » comme le leur demandent Sinn Féin et le SDLP. Arthurs ajoute : « Les jeunes gens d’aujourd’hui, comme ceux de la phase précédente du conflit, continueront d’être attirés par la lutte républicaine. »

« On peut soutenir l’idée qu’une campagne armée n’est pas à conseiller à ce moment précis, mais il ne sera jamais juste de renseigner la police sur ceux qui en ont décidé autrement. Renseigner la police, c’est faire subir à leurs familles l’oppression de l’Etat, c’est mener les volontaires à l’arrestation, à la prison et au pire à la mort.

Il était mauvais de donner des renseignements à la police il y a 20 ou 30 ans, et ça le reste aujourd’hui. Les cimetières sont pleins de jeunes républicains enterrés ici par la faute d’une petite minorité dans la communauté nationaliste qui a donné des renseignements aux forces britanniques. »

Arthurs explique que les sociétés républicains indépendantes du Tyrone n’étaient pas un parti politique, et qu’elles n’avaient pas de liens avec Republican Sinn Féin, le 32 County Sovereignty Movement, ou éirígí.

Arthurs et McCaughey ont précisé qu’ils avaient depuis longtemps des objections contre l’orientation de Sinn Féin et sa stratégie, mais qu’eux et d’autres étaient restés loyaux à la direction parce qu’ils ne voulaient pas scinder le mouvement.

« Il y a deux ans, le point de rupture a été atteint » dit McCaughey. « On nous a expliqué à un meeting dans le Tyrone que le soutien de Sinn Féin vis-à-vis du PSNI n’était pas que de la politique sur le papier, mais qu’il fallait appliquer cette ligne politique à fond, ou partir. Donc nous sommes partis. »

McCaughey, âgé de 40 ans, a été membre de Sinn Féin depuis plus de 20 ans. Il a passé 4 ans dans les Blocs H pour possession d’armes. Quant à Arthurs, il est l’ancien assistant de la députée Sinn Féin Michelle Gildernew. En 1995, ils a été condamné à 25 ans de prison pour possession d’explosifs. Il a été libéré cinq ans plus tard, suite à l’accord du vendredi saint. En 2004, il fut à nouveau arrêté en liaison avec le braquage de la Northern Bank puis libéré sans condamnation. En 2007, il fut accusé dans une affaire d’argent, puis à nouveau acquitté. On l’accuse des mêmes choses aujourd’hui, et il plaide non coupable. Sa requête de passer devant un jury et non un tribunal spécial [« Diplock court »] a été refusée. Il a fait appel de cette décision devant la Chambre des Lords.

par Suzanne Breen

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Un commentaire pour Dégoûtés, des anciens du comté de Tyrone quittent les provisoires

  1. liam dit :

    « Arthurs et McCaughey ont précisé qu’ils avaient depuis longtemps des objections contre l’orientation de Sinn Féin et sa stratégie, mais qu’eux et d’autres étaient restés loyaux à la direction parce qu’ils ne voulaient pas scinder le mouvement. »

    « Le mouvement est tout, les principes ne sont rien » – Edouard Bernstein.
    Les gens sont loyaux a un mouvement, pas a ses principes. C’est tout le probleme.

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